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Interview
Arch Enemy, le 21/08/2007
Par : Powersylv




Après plusieurs mois sur la route à défendre Doomsday Machine, ARCH ENEMY nous sort en ce mois de Septembre un Rise Of The Tyrant pas piqué des vers, équilibré et qui lorgne du côté de l’excellent Wages Of Sin. C’est un Mike Amott très courtois et de bonne humeur qui s’est prêté à l’exercice de l’interview, menée par Powersylv et également par un collègue d’un zine (Gates Of Metal) que nous ne connaissons pas … mais qui peut se manifester à nous sans problème (info.nime@nightfall.fr). Mike est confiant en son nouveau bébé. Le bonhomme est physiquement impressionnant avec son teint pâle comme un cachet d’aspirine et ses yeux noirs mais le musicien se révèle être un garçon tout-à-fait passionnant et affable.


Dark Side Of Metal Earth (D) : Bonjour Mike et bienvenue à Paris. Pour commencer cet entretien, je souhaiterai revenir sur la période Doomsday Machine. Vous avez beaucoup tourné pour cet album. Avec le recul, que penses-tu de cet album et que vous a-t-il apporté ?

Michael Amott (M) : Oui, j'aime toujours autant ce disque qui était bien heavy. Il est différent du nouveau. Je pense qu'il y a des chansons super dessus qui vont rester dans notre histoire et dans nos set-lists pour un moment, comme "Nemesis" ...

(D) : Un mot sur Christopher, ton frère. Celui-ci avait quitté le groupe juste après la sortie de Doomsday Machine et il est revenu sur le nouvel album, ce qui nous réjouit fortement. C'est assez étrange comme revirement de situation ... pourquoi ce come-back soudain ?

(M) : Quand j'ai commencé ARCH ENEMY au milieu des années 90, Christopher était encore un adolescent. Il n'avait à l'époque aucune perspective réelle dans la vie à part celui de jouer dans ARCH ENEMY. Le groupe représentait sa vie, en fait il ne connaissait que l'entité ARCH ENEMY alors que nous autres avons connu d'autres choses avant. Quand il est parti, il nous a expliqué qu'il voulait essayer d'autres expériences, voir d'autres horizons. C'était son choix et bien que surpris, nous l'avons respecté. Et au final, il s'est aperçu après ces quelques mois qu'il aimait trop la musique ... il lui a donc semblé naturel de nous contacter et de nous faire part de son envie de revenir avec nous. Bien sûr, nous avons été ravis de son retour, et ravis de retrouver le line-up de ces dernières années au complet.

(D) : Pourquoi ce titre Rise Of The Tyrant ? Y a-t-il un concept derrière ces mots ?

(M) : Je ne peux pas vraiment parler de concept album, même si j'aime bien avoir une idée central et mettre les choses en musique autour d'elle. Quand au choix du titre, c'est parce que la chanson du même nom est bien heavy et extrême ... et que personne n'a jamais utilisé ce titre avant nous (rires).

(D) : A ce propos, au début de ce titre, on entend des voix avec une personne (un tyran je suppose) qui essaie de contraindre (menacer) d'autres personnes à l'approuver ... à le louer ou que sais-je encore ... qu'est-ce que c'est ?

(M) : C'est un extrait du film Caligula. Cet empereur romain s'adresse au Sénat. Tout le monde sait que ce tyran était devenu complètement fou et ravagé par la syphilis, et dans cette scène du film, il leur dit qu'il est "L'Etoile du Matin", "Dieu" ... il veut contraindre les sénateurs à le déclarer Dieu Vivant. "S'il vous plait, élisez-moi au rang de Dieu". Une partie est d'accord, l'autre non. Ca me semblait pas mal de mettre cet extrait au début du titre. C'est un fait historique qui s'est passé il y a presque 2000 ans mais ce genre de personnage et de comportement si prévisible peut se retrouver encore dans notre époque.

(D) : tu as fait partie du groupe CARCASS, un référence du death metal. Depuis tu as beaucoup évolué au cours de ta carrière. Aujourd'hui, on peut dire que tes parties de guitares ne sonnent plus totalement comme du pur death metal car des influences plus "hard rock" se font entendre également. Est-ce une évolution naturelle ?

(M) : Je pense que mon jeu a toujours comporté une approche mélodique dans un sens. Déjà à l'époque de CARCASS, on m'avait accusé de rendre la musique plus accessible, plus catchy qu'elle ne l'était à l'origine. Dans mes tripes, j'ai cette brutalité en moi qui fait que j'ai toujours évolué dans le metal dit "extrême". C'est dans mon sang. Mais à côté de cela, j'ai toujours voulu injecter une certaine dose de mélodies qui sont dues à mes influences en tant que musicien. J'ai toujours eu le sentiment qu'ARCH ENEMY devait proposer cette mixture de thrash, de death, de guitares heavy, de passages rapides mais aussi de mélodies. Tu vois, je suis fan de Michael Schenker par exemple. J'aime conjuguer les opposés, marier ce rythme de fou (ndlr : Michael fait le bruit d'une double grosse caisse) puis juste derrière, hop (ndlr : Michael entonne un phrasé de guitare). J'aime ce contraste qui crée une véritable tension dans la musique. Certains groupes par exemple font des choses de qualité mais qui sont trop mélodiques et qui m'ennuient, parce qu'il manque cette "tension". Je pense qu'avec ARCH ENEMY nous sommes parvenus à trouver un bon équilibre entre ces facettes, ce qui fait que notre musique est assez unique. Surtout si tu ajoutes la voix d'Angela :).

(D) : Alors justement, la voix d'Angela est encore une fois incroyable, j'ai même l'impression qu'elle s'est encore dépassée ici. Dès que j'ai entendu "Blood On Your Hands" (ndlr : le premier titre du disque), j'ai été scotché. Comment fait-elle décidément pour garder cette voix si particulière et la renforcer à chaque fois ? Et pour garder cet impact sur scène tout au long d'une tournée ?

(M) : En fait, en tournée, elle est assez ennuyeuse car elle ne parle pas beaucoup afin de conserver sa voix (rires). C'est un petit bout de femme, raison de plus pour qu'elle protège sa voix car elle n'a pas le coffre d'une personne baraquée. Une nana, c'est plus fragile qu'un gros mec. Je trouve ça cool que tu aies noté ses progrès sur ce nouvel album. Elle a enregistré ses lignes vocales d'un coup cette fois, avec un micro dans la main sans le laisser sur le pied, ainsi elle a pu se donner à fond, bouger en enregistrant comme si elle était sur scène. Du coup, elle a pu donner plus de puissance. C'est assez physique que d'enregistrer un chant finalement.

(D) : Vous allez tourner prochainement avec MACHINE HEAD pour le Black Crusade Tour. Etes-vous heureux de tourner avec eux ... ? J'entends par là qu'il y avait eu quelques prises de bec par le passé notamment entre Rob Flynn et Angela ... relayées par la presse, bien entendu ...

(M) : Oui, on avait eu un empêchement à l'époque et la tournée avait dû être annulée, il y avait eu de l'énervement dans l'air effectivement. Mais bon, ceci fait partie du passé. Nous avons eu l'occasion d'en rediscuter calmement et il n'y a plus de soucis. Je ne connais pas bien leur musique, à part quelques vieux titres assez célèbres comme "Davidian". Les autres musiciens d'ARCH ENEMY connaissent mieux. MACHINE HEAD sont très bons en live, j'ai pu les voir mais je ne peux pas dire que je sois réellement fan. En revanche, nous avons eu la chance de tourner avec des groupes que je vénère comme SLAYER, MEGADETH, IRON MAIDEN. J'ai pu rencontrer Dave Mustaine qui est carrément un de mes héros, j'ai grandi avec la musique de ce mec. Enfin, on ne choisi pas avec qui on tourne mais dans l'ensemble, on n'a jamais eu trop de problèmes. On se demande de notre côté si les groupes avec qui on tourne apprécient notre musique ... si ça se trouvent ils se disent "Merde, on va encore devoir partager l'affiche avec ARCH ENEMY" (rires). Il peut arriver qu'on tourne avec un groupe dont on n'aime pas la musique, tout comme on peut se retrouver avec un autre dont on n'apprécie pas la musique au début mais on apprend à la découvrir et à l'apprécier. Par exemple, nous avons tourné avec LAMB OF GOD. Personnellement, je ne connaissais pas et je ne sais pas si sur CD j'aurai apprécié. Je l'aurai sûrement balancé aux premières écoutes. Mais quand tu es obligé de tourner avec un combo, tu entends parfois leur musique continuellement et il arrive que tu apprécies à la longue.

(D) : Il y aura un single avant l'album. Il s'agit de "Revolution Begins". Quelques mots ?

(M) : il y a 4 chansons dessus, dont 2 nouvelles extraites de l'album. "Revolution Begins" bien sûr, et aussi "Blood On Your Hands". Il y a aussi une cover de QUEENSRYCHE, "Walk In The Shadows" (extrait de l'album Rage For Order, 1986). Tout le monde dans ARCH ENEMY aime ce groupe, exception faire peut-être de Sharlee (ndlr : D'Angelo, basse). C'est le plus extrême de nous tous, il écoute surtout du DEATH, du OBITUARY, du CARCASS ... Mais bon, après que nous l'ayons jouée, il s'est mise à l'apprécier. On voulait faire une reprise plutôt surprenante en s'attaquant à un morceau et à un groupe très différent de ce que nous faisons.

(D) : Vous aimez bien les reprises et vous en faites régulièrement, à partir de groupes assez différents. On se souvient des reprises de MANOWAR, IRON MAIDEN ...

(M) : Oui, on a même fait une reprise de KISS sur la version japonaise de Rise Of The Tyrant. C'est le titre "The Oath" de leur album Music From The Elder (ndlr : album assez contesté de KISS sorti en 1981). Faire ce genre de reprise est beaucoup plus imprévisible et amusant que si nous faisions une reprise de DEATH ou de MORBID ANGEL. On reprend des morceaux de hard pour leur donner notre couleur et un côté plus brutal ... et on ne se prend pas la tête, c'est pour le fun surtout. Ce qui est amusant, c'est par exemple que notre reprise de MANOWAR est très populaire aux Etats-Unis ... et les kids qui nous la réclament ne savent même pas que c'est une chanson de MANOWAR. Ils ne connaissent même pas MANOWAR : tu parles, ils écoutent KILLSWITCH ENGAGE, ARCH ENEMY, LAMB OF GOD, IN FLAMES ... et ils ne savent pas que "Kill With Power" vient d'un gang nommé MANOWAR qui est originaire des Etats-Unis.

(D) : Il faut les éduquer en leur montrant le clip de "Gloves Of Metal" de MANOWAR (rires)

(M) : Oui, c'est clair (rires).

(D) : Dommage qu’Angela ne soit pas là (ndlr : elle devait être présente pour la promotion mais elle a annulé à la dernière minute car un peu malade) car j’aurai justement lui demander si ça l’aurait branché une reprise de « Woman Be My Slave » … (rires)

(M) : Dans ce cas, ça serait plutôt « Man Be My Slave » (rires). Pour en revenir au single, il y a aussi une chanson live : « I Am Legend / / Out For Blood» enregistrée en Amérique du Sud.

(D) : Un video clip peut-être … ?

(M) : Oui, mais ça va être quelque chose de très simple. Du style le groupe qui joue en live, dans un petit club. Je suis pas très branché video clip à la base. Mon truc à moi c’est vraiment l’aspect musical : jouer de la guitare, composer, être créatif, et bien sûr être sur scène. Tourner des clips, faire la promotion tout ça, c’est une partie du boulôt et c’est nécessaire mais ce n’est pas franchement ce que je préfère.

(D) : J’ai lu que vous revenez quasiment tout juste du Japon où vous étiez également en promotion …

(M) : Oui, et c’était vraiment un truc de fou ! On avait l’impression d’être dans un autre monde. On a même assisté à un concours de headbanging : des fans surexcités en train de headbanger partout, de faire du air guitar. L’heureux gagnant a eu un lot de choix puisque je lui ai fait don d’une de mes guitares personnelles.

(D) : Vous avez pas mal de succès au Japon, mais quels sont les autres pays où ARCH ENEMY marche bien ?

(M) : Le Japon reste un pays spécial pour nous. Notre premier album Black Earth était sorti sur un très petit label à l’époque … et on a pas compris comment mais au Japon, ça a marché tout de suite du tonnerre. Peut-être que les japonais étaient prêts à l’époque pour entendre ce genre de musique, ce metal extrême mélangé à du plus classique. Toujours est-il que là bas, l’album est passé sur un plus gros label qui a misé dessus et qui a permis à l’album d’exploser véritablement. Depuis notre succès est toujours important là bas. En Europe, à cette époque-là (1996), c’était surtout le neo-metal ou le metal plus traditionnel qui marchait. En Angleterre ou aux Etats-Unis, le public était sceptique par rapport à ce que nous faisions et on me posait des questions du style : « Pourquoi vous mettez autant de soli de guitares ? » ou ce genre de trucs. Et depuis quelques années, les soli sont remis à l’honneur. Je connais des groupes qui voulaient éviter de faire ce genre de choses, qui n’ont pas fait de soli pendant 8 albums et au bout du neuvième, pour être dans l’air du temps, il se sont dit : « Oh, et si on mettait des soli ? ». Ah ben vraiment ? On se demande pourquoi. Aux Etats-Unis, ça marche mieux maintenant. Doomday Machine s’était vendu à 100.000 exemplaires, c’est pas mal je crois pour un groupe qualifié d’extrême. En Europe, notre côte de popularité augmente progressivement à chaque fois. En France, ça marche relativement bien, en Angleterre aussi …

(D) : Vous avez quelques souvenirs de vos concerts en France ?

(M) : Oui tout-à-fait. De plus il y a un fan-club français qui s’investit pas mal. La première fois qu’on a joué ici c’était dans une salle qui s’appelait « La Boule Noire » ; il n’y avait pas grand monde et c’était sur la tournée Wages Of Sin. Pour Anthems Of Rebellion, c’était à l’Elysée-Montmartre, un concert très cool : on a même utilisé un extrait pour un EP (ndlr : le EP Dead Eye See No Future). Et la dernière fois c’était au Bataclan.

(D) : Exact, j’y étais d’ailleurs.

(M) : C’était notre premier concert sans Chris d’ailleurs. Et avec Fredrik (ndlr : Åkesson) à la guitare. Nous étions donc un peu nerveux. J’aurai bien aimé que l’on donne plus de concerts en France à l’occasion du Black Crusade Tour. Cette tournée joue 2 soirs de suite à Paris. Mais je pense que nous reviendrons de toute manière ensuite en tête d’affiche.